Horlogerie

L’horloger jurassien Pequignet s’imagine une dimension industrielle

Pequignet, l’un des derniers horlogers français à concevoir ses propres mécanismes, s’apprête à lancer un nouveau modèle, abordable, imaginé pour la production en série. L’objectif de la PME,installée à Morteau, est d’acquérir une dimension industrielle en vendant celui-ci en marque blanche.

Les quatre dirigeants de Pequignet. (de gauche à droite) : Antoine Commissione, Dani Royer (PDG), Aymeric Vernhol, Bernard Espinas.(@Pequignet)
Les quatre dirigeants de Pequignet. (de gauche à droite) : Antoine Commissione, Dani Royer (PDG), Aymeric Vernhol, Bernard Espinas.(@Pequignet)

L’historique manufacture horlogère Pequignet, fondée en 1973 à Morteau dans le Doubs, vit un moment charnière. L’entreprise, qui emploie 19 personnes, s’apprête à commercialiser, en septembre prochain, son nouveau mécanisme de montre, le calibre Initial. Celui-ci témoigne des ambitions de la marque, qui entend acquérir une dimension industrielle. « Notre but est davoir une montre manufacture accessible au cadre moyen, vendue autour de 2000 à 3000 euros, selon les finitions », décrit Aymeric Vernhol, l’un des quatre associés qui a repris l’entreprise en 2017, après sa liquidation en 2016.

Entreprise du patrimoine vivant

Labellisée « Entreprise du patrimoine vivant » (EPV), Pequignet est l’un des derniers horlogers français à disposer de ses propres calibres. Mais, pour l’heure, ses deux modèles phares, le calibre Royal et le calibre EPM02 ne sont pas proposés aux autres fabricants, et demeurent coûteux à produire, du fait de leur taille spécifique. « Pour le calibre Initial, nous sommes repartis dune feuille blanche, et avons adopté les dimensions standards. Ce mouvement automatique est un trois aiguilles date instantanée, doté de 65 heures de réserve de marche. Cest une performance, nos concurrents suisses se contentent dune trentaine dheures de réserve », précise-t-il. Au-delà de ses caractéristiques, ce calibre vise surtout la production de série, et se destine autant à son créateur, qu’aux autres entreprises désireuses d’intégrer un mécanisme français, qui sera proposé en marque blanche.

Labellisation Unesco et EPV

Pequignet compte produire, la première année, 2000 à 2500 calibres Initial, et s’en réserver environ 40 %. « Nous avons des ambitions raisonnables et raisonnées sur ce projet, et estimons que notre capacité de production actuelle, grâce à la polyvalence de nos employés, sera suffisante », assure le responsable. Quatre ans après la reprise par quatre de ses salariés, l’entreprise renoue avec la croissance, et réalise un chiffre d’affaires, en progression, d’environ 2 millions d’euros. « Nous avons passé dix-huit mois à rassurer nos partenaires, et avons développé, à cet effet, notre second calibre, EPM02. Avec notre calibre Initial, nous espérons renforcer notre présence, et nos capacités dexport, ce secteur représentant aujourdhui 35 % de notre chiffre daffaires. Nous espérons atteindre 50 % à terme », note Aymeric Vernhol.

Le pari est ambitieux, d’autant que le secteur horloger vit mal la crise sanitaire, et la progression fulgurante des montres numériques. Le Suisse Swatch Group a enregistré une perte nette de 53 millions de francs suisses (49 millions d’euros) en 2020, contre un bénéfice de 748 millions en 2019. Mais le français Pequignet jouit d’une image prestigieuse, grâce à son statut d’EPV, et à la labellisation, le 16 décembre dernier, du « savoir-faire en mécanique horlogère et mécanique dart »jurassien au rang de patrimoine culturel immatériel de l’humanité. « Ces distinctions nont aucun impact sur nos ventes en France, mais constituent des aides précieuses pour les marchés asiatiques, qui y sont sensibles », conclut Aymeric.

Pour Aletheia Press, Arnaud Morel