L’entreprise et les salariés

Revue de récentes décisions de justice en matière de droit du travail.

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Congés payés : maladie, accident du travail

Il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) et de la Cour de cassation que les dispositions de l’article L 3141-5 du Code du travail doivent être partiellement écartées en ce qu’elles limitent à une durée ininterrompue d’un an les périodes de suspension du contrat de travail pour cause d’accident du travail ou de maladie professionnelle assimilées à du temps de travail effectif, pendant lesquelles le salarié peut acquérir des droits à congés payés. Dès lors, ce dernier peut y prétendre au titre de cette période. Le salarié licencié pour inaptitude à l’issue de son arrêt de travail est donc fondé à réclamer au juge des référés une provision sur l’indemnité compensatrice de congés payés restant due. (Bordeaux, 7 février 2024, RG no 23/04292).

Lorsque le salarié s’est trouvé dans l’impossibilité de prendre ses congés payés annuels au cours de l’année prévue par le Code du travail ou une convention collective, en raison d’absences liées à une maladie, un accident du travail ou une maladie professionnelle, les congés payés acquis doivent être reportés après la date de reprise du travail ou, en cas de rupture, être indemnisés. (Cass soc., 28 février 2024, pourvoi n° 22-19156)

Licenciement : motif économique

Ne constitue pas un motif légitime de licenciement économique la fermeture temporaire, même pour plusieurs mois, d’un hôtel pour rénovation décidée par l’employeur, compte tenu de la légèreté blâmable de son prédécesseur qui avait maintenu l’exploitation de l’activité dans des lieux menacés de fermeture administrative et n’avait pas déféré à l’injonction de réaliser des travaux, pourtant urgents. (Paris, 21 décembre 2023 RG, no 21/02983).

Le recours au site Doctolib, même s’il a réduit le temps de secrétariat en termes de rendez-vous, ne peut pas s’analyser en une mutation technologique au sens du 2o de l’article L 1233-3 du Code du travail justifiant le licenciement économique d’une secrétaire médicale. (Paris, 15 février 2024, RG no 21/01253)

CDD : requalification

Le salarié engagé par plusieurs contrats à durée déterminée non successifs et dont le contrat de travail est requalifié en un contrat à durée indéterminée à temps complet ne peut prétendre à un rappel de salaire au titre des périodes interstitielles séparant les contrats que s’il prouve s’être tenu à la disposition de l’employeur, pendant ces périodes, pour effectuer un travail. (Cass soc., 28 février 2024, pourvoi n° 22-11149)

Rémunération : heures supplémentaires

Une cour d’appel ne peut pas, pour débouter un salarié de sa demande au titre des heures supplémentaires, au motif qu’il ne fournit pas d’éléments suffisamment précis, relever qu’il produit deux tableaux indiquant le quantum des heures qu’il dit avoir accomplies et que ces tableaux n’indiquent ni les horaires de travail, ni les temps de pause journaliers. (Cass soc., 28 février 2024, pourvoi n° 22-23047)

Santé au travail : inaptitude, réintégration

Le salarié déclaré inapte ne peut pas être licencié pour un motif autre que l’inaptitude. (Cass soc., 28 février 2024, pourvoi n° 22-23568)

Toute rupture du contrat de travail prononcée à l’égard d’un salarié en raison de son état de santé est nulle. Dès lors qu’il caractérise une atteinte au droit à la protection de la santé, garanti par la Constitution, le salarié qui demande sa réintégration a droit au paiement d’une indemnité égale au montant de la rémunération qu’il aurait dû percevoir entre son éviction et sa réintégration, peu important qu’il ait ou non reçu des salaires ou revenus de remplacement pendant cette période. (Cass soc., 28 février 2024, pourvoi n° 21-25520)