Social

L’entreprise et les salariés

Revue de récentes décisions de justice, en matière de droit du travail.

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Entretiens professionnels

Le défaut d’organisation des entretiens professionnels obligatoires cause au salarié un préjudice résultant de l’absence de possibilité de construire des perspectives d’évolution professionnelle en les inscrivant dans le cadre de la relation de travail. (Grenoble, 7 novembre 2023, RG n° 21/04334)

Rémunérations

La cour d’appel, ayant constaté que l’employeur, pendant plus de sept années, avait versé de façon continue au salarié des primes d’équipe et de casse-croûte, auxquelles ce dernier, faute de travailler en équipe, ne pouvait prétendre, a ainsi fait ressortir leur contractualisation. Et elle a pu écarter l’existence d’une d’erreur dans le paiement de ces primes. (Cass soc., 13 décembre 2023, pourvoi n° 21-25501)

Les demandes du salarié en rappel de salaires, au titre d’heures supplémentaires et d’une reclassification, sont recevables, les sommes réclamées n’étant pas mentionnées à ce titre par le reçu pour solde de tout compte. (Cass soc., 13 décembre 2023, pourvoi n° 22-19121)

Santé au travail

Lorsqu’un salarié démissionne en raison de faits qu’il reproche à son employeur, cette rupture constitue une prise d’acte qui produit les effets, soit d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, le cas échéant nul, si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d’une démission. Tel est le cas lorsque le salarié explique la cessation de ses fonctions par l’existence d’une situation de harcèlement moral et la dégradation de son état de santé. (Cass. Soc., 13 décembre 2023, pourvoi n° 22-18670)

Ayant estimé qu’aucun élément ne permettait de retenir que l’avis d’inaptitude dactylographié mentionnant les voies et délais de recours par le salarié ou l’employeur avait été remis personnellement à la salariée à l’issue de la visite médicale, la cour d’appel a pu décider que le délai de recours contre cet avis de 15 jours ne lui était pas opposable. (Cass soc.,13 décembre 2023, pourvoi n° 21-22401)

Discriminations

Dès lors que la salariée, titulaire d’un diplôme étranger, n’a pas bénéficié de la classification conventionnelle à laquelle elle peut prétendre depuis son embauche et que l’employeur fait référence, dans ses conclusions, à l’absence de diplôme français et d’expérience professionnelle en France, ces éléments laissent supposer l’existence d’une discrimination en raison de son origine. (Cass soc., 20 décembre 2023, pourvoi n° 21-20904)

Licenciements

Lorsque les faits pour lesquels l’autorisation administrative de licenciement d’un salarié protégé a été définitivement accordée ont fait l’objet de poursuites pénales à la suite desquelles l’intéressé a bénéficié d’une relaxe, le juge prud’homal ne peut pas qualifier ces mêmes faits de faute grave. (Cass soc., 6 décembre 2023, pourvoi n° 22-18325)

La faute grave étant celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise, la mise en oeuvre de la procédure de licenciement doit intervenir dans un délai restreint après que l’employeur a eu connaissance des faits allégués, dès lors qu’aucune vérification n’est nécessaire. (Cass soc., 20 décembre 2023, pourvoi n° 22-21685)

Un motif tiré de la vie personnelle du salarié ne peut pas justifier, en principe, un licenciement disciplinaire, sauf s’il constitue un manquement de l’intéressé à une obligation découlant de son contrat de travail. Une conversation privée, qui n’est pas destinée à être rendue publique, ne peut pas constituer un manquement du salarié aux obligations découlant du contrat de travail. Il en résulte que le licenciement disciplinaire d’un salarié, en raison de propos échangés lors d’une conversation privée avec une collègue, via la messagerie intégrée au compte Facebook personnel de l’intéressé, installé sur son ordinateur professionnel, n’est pas justifié. (Cass. ass plén., 22 décembre 2023, pourvoi n° 21-11330)

François TAQUET, avocat,
spécialiste en droit du travail et protection sociale