Bourgogne : Bientôt le retour de la moutarde ?

Depuis des mois, les supermarchés affichent des rayons vides parmi les condiments, la moutarde manque. Alors que la récolte des graines de moutarde s’est achevée cet été en Bourgogne, les industriels de Côte-d’Or préviennent que la pénurie risque de durer encore un peu.

– Les usines de moutarde recevront la récolte bourguignonne à la mi-septembre, tandis que les rayons pourraient être ravitaillés en octobre prochain. (@ Européenne de condiment)
– Les usines de moutarde recevront la récolte bourguignonne à la mi-septembre, tandis que les rayons pourraient être ravitaillés en octobre prochain. (@ Européenne de condiment)

« La pénurie de moutarde n’est pas finie » insiste Luc Vandermaesen, dirigeant de Reine de Dijon à Fleurey-sur-Ouche et président de l’Association moutarde de Bourgogne, avant de compléter « le manque total dans les rayons devrait se poursuivre en septembre. » Pour autant, pas de panique, le condiment si cher à la région Bourgogne-Franche-Comté devrait revenir en octobre grâce à une bonne récolte à l’été 2022. « Nous avons une production qui augmente de 50% par rapport à 2021, mais il faut le temps de trier les graines et de répondre à nos exigences de qualité. Cette moutarde n'arrivera dans nos usines qu’à la mi-septembre. »

L’an dernier, 4 000 tonnes avaient été récoltées contre 6 000 tonnes cette année. Pour autant, cette quantité est loin de suffire aux besoins des industriels et des consommateurs qui avoisinent les 35 000 à 40 000 tonnes annuelles. « La récolte 2022 s’appuie sur les demandes faites par la filière à l’automne dernier, avec des surfaces supplémentaires. » Pour obtenir ses hectares en plus, les industriels ont accepté d’y mettre le prix et d’augmenter la rémunération des producteurs.

L’inconnue canadienne

Pour renflouer les stocks, la filière de la moutarde compte sur la production canadienne. « La récolte a débuté fin août, mais nous n’avons pas encore de retour sur les quantités. Moins les producteurs nous donnent d’information, plus ils peuvent espérer des prix élevés. » Luc Vandermaesen admet ce jeu de l’offre et de la demande et attend que la moisson soit plus avancée pour pouvoir se positionner au mieux.

A chacun des industriels de l’association de choisir sa stratégie commerciale, tandis que ces graines canadiennes n’arriveront dans leurs usines qu’en décembre. « On pourra retrouver de la moutarde française. Mais pour un marché serein, il faudra au moins attendre 2023, sans pour autant oublier l’impact énergétique qui vient s’ajouter aux augmentations de prix. »

Les surfaces de moutarde cultivées en France ne cessent d’augmenter pour répondre à la demande et réduire les risques de pénurie. (@ Reine de Dijon)


A chacun sa moutarde

D’ailleurs, pendant la pénurie, le président de l’association moutarde de Bourgogne regrette que certains commerces peu scrupuleux, notamment en ligne, aient proposé de la moutarde a des prix exorbitants. « On a trouvé des produits proches de l’illégalité, se faisant passer pour de la moutarde de Dijon mais qui n’en avait pas la qualité. » Interpellé sur la présence de moutarde dans les rayons des magasins à l’étranger, Luc Vandermaesen sourit. France reste la principale consommatrice de ce condiment jaune quand les autres pays ont du stock plus longtemps, car la demande reste moindre.

« En France, nous ne sommes pas habitués à ce qu’un produit fabriqué en si petit tonnage vienne à manquer et, comme il est emblématique, on le remarque. » Pour éviter de vivre une nouvelle pénurie ou limiter l’impact des aléas climatiques, les industriels et les professionnels de la filière, les agriculteurs en tête, ont choisi de multiplier par 2,5 les surfaces cultivées en 2023 avec l’objectif d’atteindre 15 000 tonnes de moutarde en France.

Pour Aletheia Press, Nadège Hubert