Economie

Pétrole, gaz, électricité : la facture énergétique reste salée en France !

Malgré le repli temporaire des cours des matières premières énergétiques depuis la fin de l’année 2022, le coût à la charge des ménages et des entreprises reste élevé, d’autant que le gouvernement retire progressivement ses aides…


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Dans sa lettre à madame Denis datée de 1752, Voltaire rappelait, fort à propos, que « les bonnes nouvelles sont toujours retardées, et les mauvaises ont des ailes ». C’est encore plus vrai dans le secteur énergétique où les mauvaises nouvelles volent souvent « en escadrille ». Ainsi, il n’y a pas que la facture d’électricité qui reste élevée, puisque les coûts des carburants et du chauffage continuent de peser très lourd dans le budget des ménages et entreprises.

Repli temporaire des cours des matières premières énergétiques

Après son cours le plus bas atteint durant le premier confinement en 2020, le baril de pétrole a connu une tendance haussière jusqu’au milieu de l’année 2022, avant de se replier. Hélas, au début du mois de juillet, les deux grands exportateurs de pétrole que sont la Russie et l’Arabie Saoudite, membres de l’Opep + (alliance de pays exportateurs de pétrole composée de 13 pays membres et de neuf alliés), ont annoncé une limitation de leur production de brut. Il s’agit ainsi de conserver les cours à un niveau suffisamment élevé, compatible notamment avec les besoins de financement du programme économique « Vision 2030 » du royaume saoudien. Au même moment, l’Agence internationale de l’énergie (AIE) annonçait que la consommation mondiale de pétrole s’achemine vers un record absolu en 2023. L’un dans l’autre, ces deux effets se conjuguent ainsi pour tirer les cours du brut à la hausse, depuis quelques semaines.

En ce qui concerne le marché du gaz, même s’il s’est assagi, il reste dépendant comme le pétrole des enjeux géopolitiques, du climat et des variables économiques. La réduction draconienne des livraisons de gaz russe en Europe aura d’ailleurs conduit à des bouleversements structurels, comme l’achat massif de gaz naturel liquéfié (GNL), dont le prix est, hélas, bien plus volatil et l’approvisionnement moins assuré. L’UE est, en effet, la dernière venue sur ce marché dont l’offre n’est pas nécessairement en mesure de répondre à une forte demande mondiale.

Difficultés persistantes pour les ménages et entreprises

L’hiver dernier, les changements de comportements et l’atonie économique, conjugués à un hiver moins rude que prévu, auront permis à l’UE de sortir sans encombre de l’ornière énergétique. Il s’agit désormais de transformer l’essai cette année, d’autant que de récentes recherches menées par les économistes Lionel Fontagné, Philippe Martin et Gianluca Orefice, ont montré la grande capacité d’adaptation des entreprises à la hausse des coûts énergétiques.

Néanmoins, si les prix énergétiques s’envolent durant un hiver froid, alors chauffer les habitations personnelles et professionnelles risque de devenir extrêmement coûteux en Europe. Remplir sa cuve de fioul est d’ailleurs déjà devenu de plus en plus onéreux depuis le début de l’été. Quant aux prix des carburants, ils dépendent, entre autres, des cours du brut, du taux de change du dollar et des marges des distributeurs, autant de variables mal orientées actuellement pour le consommateur…

La fin progressive du coûteux bouclier énergétique en France

En France, il faudra également compter avec l’arrêt progressif des aides à l’énergie mises en place depuis deux ans. Il est vrai que le gouvernement peine à boucler son budget 2024, pour lequel il est prévu 15 milliards d’euros d’économie, dans le but de s’attirer les bonnes grâces des financeurs et partenaires européens.

Pris au pied de la lettre, cela signifie la fin du chèque énergie (gaz, fioul, bois…), la fin des aides à la pompe pour les carburants, la fin des autres chèques énergie exceptionnels, etc. Quant au bouclier tarifaire pour l’électricité destiné aux particuliers, aux petites collectivités territoriales et aux microentreprises, il devrait s’éteindre progressivement, d’ici à la fin de l’année 2024, celui concernant le gaz pour les particuliers s’étant déjà arrêté en juillet. Au total, les tarifs réglementés de vente de l’électricité (TRVE) auront déjà connu deux augmentations en 2023, en février (15 %) et en août (10 %). Et que dire des clients de fournisseurs alternatifs d’électricité (Eni et Engie principalement), qui ont découvert, cet été, le montant effarant d’une régularisation du prix du kWh !

Pourtant, dès le 20 juillet, l’on assistait déjà à un retournement (palinodie ?) avec ce décret disposant que « dans la continuité du chèque énergie exceptionnel, qui soutient les ménages faisant face à des hausses de charges énergétiques, le présent décret met en œuvre une aide exceptionnelle au bénéfice des gestionnaires de résidences sociales, foyers de jeunes travailleurs […] et foyers de travailleurs migrants […] ». Au vu des nombreux tumultes sociaux et politiques qui ont émaillé le début de l’année 2023 en France, il y a fort à parier que le gouvernement n’hésitera pas à remettre la main au portefeuille, en cas de nouveaux troubles, même s’il faut rappeler le coût astronomique du bouclier énergétique sur la période 2022-2023 : 85 milliards d’euros, selon un rapport sénatorial de juin 2023 !