Recrutements : « La diversité représente un vivier de compétences à ne pas négliger »

Olivier Desurmont, président et cofondateur de Cooptalis

Sur un marché de l’emploi en tension, explorer de nouvelles pistes de candidats s’avère une potentielle solution pour les entreprises. Mais pour cela, elles doivent réussir à désamorcer les préjugés liés à l’âge, la nationalité ou au handicap. Interview d’Olivier Desurmont de Cooptalis, entreprise spécialisée dans le recrutement international et la mobilité professionnelle.

Olivier Desurmont, président et cofondateur de Cooptalis

Où en sont les entreprises en termes de diversité dans leur recrutement ?

Dans le contexte actuel de pénurie de talents, les entreprises n’ont pas intérêt à se priver de potentielles ressources ou à ralentir leur développement. La diversité dite « étendue », c’est-à-dire, liée à la géographie, à l’âge et aux situations de handicap, représente, dans ce contexte, un vivier de compétences à ne pas négliger. Certaines entreprises cherchent aussi à renforcer leurs valeurs et leur politique d’inclusion, en recrutant des profils divers ou minoritaires, dans le cadre d’une démarche RSE. Cette approche s’avère avantageuse pour attirer de nouveaux talents, qui cherchent de plus en plus à travailler dans une entreprise en accord avec leurs valeurs et convictions personnelles. S’ouvrir à des recrutements plus diversifiés permet d’attirer des talents avec les compétences recherchées, tout en renforçant son engagement en termes d’inclusion. Selon une étude que nous avons menée auprès de plus de 500 entreprises françaises, 44% d’entre elles comptent plus de 10% de profils issus de la diversité au sein de leurs effectifs. Les observateurs s’accordent sur les changements de comportements en faveur de l’inclusion, même s’il reste beaucoup à faire.

Comment peuvent-elles ouvrir leur recrutement à de nouveaux profils ?

Aujourd’hui 75% des recruteurs français estiment faire de leur mieux pour ouvrir leurs recrutements aux publics issus de cette diversité étendue, pourtant, la plupart des entreprises estiment que les mesures instaurées par la fonction publique, telles que le respect des quotas, sont inadaptées, insuffisantes ou difficiles à atteindre. Pour ouvrir le processus de recrutement, les professionnels des RH ainsi que les cabinets de recrutement doivent revoir leurs critères et s’assurer que l’entreprise qui recrute sera capable de s’adapter. La promotion de la diversité au travail passe parfois simplement par l’acceptation d’une personne qui ne parle pas la même langue. Dans ce type de cas, il faut avoir la capacité de l’accueillir et l’intégrer. Les organisations doivent se montrer flexibles. Idem quand l’installation d’équipements spécifiques est requise, par exemple pour des personnes à mobilité réduite ou aveugles. L’enjeu de la diversité va aujourd’hui plus loin qu’un simple constat d’égalité entre hommes et femmes au sein des effectifs. Pour constituer une équipe vraiment diverse, les recruteurs peuvent se tourner vers des candidats auxquels ils n’auraient pas forcément pensé auparavant : travailleurs seniors, profils internationaux, réfugiés et expatriés, débutants, en situation de handicap, en réinsertion professionnelle…

Comment combattre les discriminations liées à l’âge ?

Pour combattre les discriminations liées à l’âge, phénomène récemment confirmé par l’Apec et Pôle emploi, il est primordial pour les entreprises de mettre en place une politique de formation et de sensibilisation des talents. Un des principaux freins à l’embauche des candidats seniors est le salaire, élevé en comparaison de celui d’un collaborateur moins expérimenté. Accueillir des seniors va donc souvent de pair avec une stratégie de mentorat interne permettant à ces derniers de transmettre leur expérience et leurs connaissances. Encourager chaque collaborateur à partager ses compétences et à échanger autour de son parcours est un moyen de lutter contre les discriminations de manière générale.

Quels sont les atouts des cadres seniors ?

Les profils seniors sont devenus des ressources recherchées. Selon notre étude sur la diversité étendue, 56% des DRH français indiquent avoir déjà recruté des candidats seniors. Parmi ces recrutements, 42% sont des CDI, et 50% sont réalisés sur des missions temporaires de types coaching ou freelancing. Leur expertise et leurs compétences sont des facteurs importants de la réussite rapide des projets. Le parcours bien rempli et souvent multi-terrains figure également parmi leurs principaux atouts pour les entreprises. Leur maîtrise des relations interpersonnelles et des émotions, leur capacité et envie de transmettre aux plus jeunes représentent aussi autant d’opportunités.

Quels sont les avantages pour les entreprises de recruter ce type de profil ?

L’Apec met en avant le fait que les cadres seniors peuvent répondre aux besoins des entreprises qui recherchent des compétences spécifiques, sur des missions dont la durée est limitée dans le temps. Avec deux atouts : leur disponibilité et leur opérationnalité immédiates et leur absence de besoin en matière d’évolution professionnelle. Bénéficiant d’une expérience importante, les cadres seniors sont en mesure d’accompagner leurs collaborateurs plus juniors ou moins expérimentés, ouvrant ainsi la voie à des échanges entre collègues. Une dynamique bénéfique non seulement au bon fonctionnement d’un projet, mais aussi à l’entente des collaborateurs. Dans les entreprises qui mettent en place une véritable politique de mentorat et de transmission des savoir-faire et savoir-être en interne, on note une nette amélioration de l’engagement, de la motivation et des performances, à la fois pour le mentor et le mentoré.

Charlotte DE SAINTIGNON