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Municipales 2026 : pas de désengagement massif de la part des maires sortants

Les résultats d’une récente enquête sur « L’état d’esprit des maires à un an du scrutin » montrent qu’en dépit des difficultés qu’ils peuvent rencontrer le nombre des maires qui envisagent de se représenter en 2026 devrait être semblable à celui observé en 2020.






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À moins d’un an des prochaines élections municipales, l’étude* menée par des chercheurs du Centre de recherches politiques de Sciences Po (Cevipov) auprès des maires en France fournit de précieuses informations sur leur état d’esprit à un an du scrutin de mars 2026. Qui envisage de se représenter ? Qui a prévu de passer la main ? Et pourquoi ?

Pas de renoncement généralisé, mais un climat d’incertitude

Premier élément de réponse tiré de cette enquête : en dépit des aléas survenus ces dernières années (Covid-19, crise énergétique, mise en cause des communes dans le déficit des finances publiques, suppression de la taxe d’habitation, manque de visibilité budgétaire…), le nombre de maires qui comptent se représenter l’année prochaine n’a pas beaucoup diminué par rapport au précédent scrutin de mars 2020. Ainsi, à un an des élections, 28% de ceux ayant répondu à l’enquête ont déclaré ne pas vouloir briguer un nouveau mandat en 2026, soit le même taux qu’en octobre 2019, à cinq mois du scrutin. 42% des répondants se sont déclaré prêts à se représenter en mars prochain, contre 48% en octobre 2019. Enfin, 30 % d’entre eux n’ont pas encore pris leur décision, contre 23 % en 2019. C’est donc la part de ceux qui hésitent encore, à un an du scrutin, qui est plus importante qu’à cinq mois de l’échéance, six ans plus tôt. Des résultats qui, selon les chercheurs du Cevipof, ne témoignent pas d’un renoncement généralisé, mais plutôt d’un climat d’incertitude. Sauf imprévu d’ici mars 2026, il ne faut pas s’attendre à une démission massive de la part des maires actuellement en fonction.

Seuls 37% des maires des plus petites communes ont l’intention de se représenter

Ces résultats globaux méritent toutefois d’être nuancés en fonction de la taille de la commune. Si 70% des maires de villes de plus de 9 000 habitants ont l’intention de briguer un nouveau mandat, seuls 37% des maires des communes de moins de 500 habitants – qui manquent cruellement de moyens humains et financiers – ont l’intention de se représenter en 2026. On observe le même écart parmi ceux qui ont déjà pris la décision de ne pas se représenter : ils sont 13% dans les plus grandes communes, contre 30% dans les plus petites, où le sentiment d’isolement des élus est plus sensible.

Autre critère structurant mis à jour par cette enquête : plus le nombre de mandats successifs est élevé, plus le souhait de ne pas se représenter l’est aussi. L’âge et la lassitude à l’égard de ce rôle de maire, très chronophage et qui use, sont donc des facteurs importants dans la décision. 46% des répondants qui en sont à leur premier mandat souhaitent se représenter, mais ils ne sont plus que 38% parmi ceux qui en sont à leur deuxième mandat et 36% après trois mandats.

La situation socioprofessionnelle des élus, et en particulier le fait d’être retraité ou non, est également un critère qui pèse dans leur décision de se représenter ou non. Il ressort en effet que seuls 33% des maires retraités déclarent être prêts à renouveler leur engagement contre 53% pour les non-retraités. Une situation qui peut s’expliquer par les difficultés pour les actifs à concilier un mandat de maire avec une vie professionnelle, et qui, selon les chercheurs, constitue un « signal d’alerte » étant donné le faible pourcentage de maires retraités désireux de se représenter.

Décalage entre le manque de moyens et de compétences et les attentes des citoyens

De façon générale, c’est le manque de ressources financières pour mener à bien leurs missions et l’exigence trop forte – la pression, voire les incivilités – de leurs concitoyens qui arrivent en tête des raisons invoquées par les maires qui ne souhaitent pas ou hésitent à se représenter. Interrogés sur la nature des dossiers qu’ils trouvent complexes à traiter, les élus ont évoqué leurs difficultés face à l’inflation normative et réglementaire, en général, et pointé plus particulièrement les questions relatives à l’urbanisme, la sécurité et l’aménagement de l’espace.

Face à ces difficultés, les répondants à l’enquête ont déclaré que leur premier soutien est le « cercle municipal » : secrétaire de mairie ou directeur général des services, selon la taille de la commune (32%), adjoints au maire (29%), conseillers municipaux (13%), loin devant d’autres soutiens institutionnels (préfectures, agences de l’État, associations d’élus locaux). Nombre d’entre eux ont relevé leur manque de formation pour mener à bien certains dossiers, tout ou reconnaissant ne pas disposer du temps nécessaire pour suivre de telles formations.

La force de l’engagement civique et de l’éthique personnelle

Face à ces difficultés et au déficit de reconnaissance dont souffre la fonction, l’un des principaux ressorts de l’engagement ou du réengagement des maires est la volonté de se rendre « utile », au service de la communauté, d’être « un bon citoyen » et d’œuvrer « pour l’intérêt général ». Un engagement au service des autres que certaines données de l’étude permettent de chiffrer : les maires consacrent, en moyenne, 32 heures par semaine à leur office et ils ne prennent que 2,7 semaines de congé par an. « Certains maires gardent la foi quand d’autres, portés par un cumul de lassitude, de solitude, et un sentiment d’abandon face à une fonction de plus en plus complexe, se désengagent silencieusement », concluent les chercheurs du Cevipof.

* Enquête envoyée à 34 690 maires entre le 3 et 31 mars 2025 et menée en partenariat avec le ministère de l’Aménagement du territoire et de la Décentralisation, et six associations d’élus locaux (Association des Maires de France, Association des maires ruraux de France, Villes de France, Association des petites villes de France, Intercommunalités de France, France Urbaine)