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L’entreprise et les salariés : du côté des tribunaux

Revue de récentes décisions de justice, en matière de droit du travail.

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Contrat de travail

A défaut de choix par les parties de la loi applicable, le contrat de travail est donc régi par la loi du pays où le salarié, en exécution du contrat, accomplit habituellement son travail, sauf s'il présente des liens plus étroits avec un autre pays et ce dernier rattachement peut venir conforter un choix contesté. (Dijon, 20 juillet 2023, RG n° 22/00009)

Licenciement

L'insuffisance professionnelle se définit comme l'incapacité objective et durable d'un salarié à exécuter de façon satisfaisante un emploi correspondant à sa qualification. Si l'appréciation relève du pouvoir de direction de l'employeur, ce dernier doit, en tout état de cause, invoquer des faits objectifs précis et vérifiables imputables au salarié pour justifier le licenciement. (Versailles, 20 juillet 2023, n° 21/01157)

Le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur dans la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, doit être apprécié au vu des éléments fournis par les parties ; si un doute subsiste, il profite au salarié (article L1235-1 du Code du travail). L'insuffisance professionnelle consiste en l'inaptitude du salarié à exécuter correctement les tâches qui lui sont confiées et qui correspondent à sa qualification professionnelle, sans qu'il soit nécessaire de caractériser l'existence d'une négligence ou d'une mauvaise volonté de sa part. Pour caractériser une cause de licenciement, l'insuffisance professionnelle alléguée par l'employeur doit reposer sur des éléments concrets et avoir des répercussions négatives sur la bonne marche de l'entreprise. Elle doit être appréciée en fonction d'un ensemble de données, telles que la qualification du salarié lors de l'embauche, les conditions de travail, l'ancienneté dans le poste, la formation professionnelle reçue. (Pau, 27 juillet 2023, n° 21/03205)

La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise. Il appartient à l'employeur de rapporter la preuve de la faute grave commise par le salarié. (Dijon, 20 juillet 2023, n° 21/00852)

Démission

Lorsqu'un salarié démissionne en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture constitue une prise d'acte et produit les effets : soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, si les faits invoqués la justifiaient ; soit d'un licenciement nul, si les manquements reprochés à l'employeur sont de nature à entraîner la nullité du licenciement ; soit, dans le cas contraire, d'une démission. C'est au salarié qu'il incombe de rapporter la preuve des faits qu'il impute à son employeur ; s'il subsiste un doute, celui-ci profite à l'employeur. L'écrit par lequel le salarié prend acte de la rupture du contrat de travail en raison de faits reprochés à son employeur ne fixe pas les limites du litige ; le juge est tenu d'examiner les manquements de l'employeur invoqués devant lui par le salarié, même si celui-ci ne les a pas mentionnés dans cet écrit. (Bourges, 13 juillet 2023, n° 22/01085)

Sanctions

Aux termes de l'article L. 1332-4 du Code du travail, aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu, dans le même délai, à l'exercice de poursuites pénales. Cependant, il est acquis que ce dernier peut sanctionner un fait fautif qu'il connaît depuis plus de deux mois, dans la mesure où le comportement du salarié s'est poursuivi ou réitéré dans ce délai, et s'il s'agit de faits de même nature. (Bourges, 13 juillet 2023, n° 22/00960)

François TAQUET, avocat,
spécialiste en droit du travail et protection sociale