L’économie française entre chocs et résilience

« La croissance résiste, l’inflation aussi ». C’est ainsi que la dernière note sur la conjoncture économique publiée par l’Insee, le 15 mars dernier, résume la situation économique de la France.

(c) Adobe Stock
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Selon le chef de la division synthèse conjoncturelle de l’Insee, Olivier Simon, les chiffres la dernière note de conjoncture « témoignent des chocs mais aussi de la résistance de l’économie française ». De fait, trois ans après le premier confinement et un an après la guerre en Ukraine, le PIB de la France au quatrième trimestre 2022 était supérieur de 1,2% à celui enregistré à la même période de 2019 et de 0,5% par rapport à celui de fin 2021.

Une croissance portée par l’investissement des entreprises

C’est l’investissement des entreprises qui a porté la croissance en 2022 (+8,8% par rapport au dernier trimestre de 2019 et +5,5% par rapport au trimestre 4 de 2021), alors que la consommation des ménages a enregistré une baisse (- 0,2% par rapport à fin 2019 et - 1,2% entre fin 2021 et fin 2022) et que l’emploi salarié se maintenait sur sa lancée (+4,5% par rapport à fin 2019 et +1,3% par rapport au trimestre 4 de 2021). Reste que le fait marquant de cette période économique perturbée est l’envolée de l’indice des prix à la consommation : en février 2023, il a atteint un niveau supérieur de +10,8% par rapport à février 2020 et de +6,3% par rapport au même mois de 2022.

Persistance de l’inflation et baisse du pouvoir d’achat des ménages en 2023

Selon les prévisions de l’Insee à la mi-2023, la croissance du PIB va se maintenir en France mais à un niveau très modeste, soit +0,1% au premier trimestre et +0,2% au deuxième, accompagné d’un ralentissement sur le marché du travail ( décélération de l’emploi salarié et stabilité du taux de chômage à 7,2%). Alimentée non plus par les cours du pétrole, en nette décrue par rapport à l’an dernier, mais par la hausse des prix des produits alimentaires, l’inflation devrait refluer légèrement et se situer, en juin prochain, autour de 5,5% sur an. Et le pouvoir d’achat des ménages se replierait en 2023, du fait de la hausse des prix.

Les deux tiers des ménages ont dû changer leurs habitudes de consommation

La hausse des prix de l’alimentation et de l’énergie a contribué à accentuer les écarts entre les ménages les plus pauvres et les autres. Les deux tiers des ménages interrogés par l’Insee, dans le cadre de cette enquête de conjoncture, ont déclaré avoir modifié leurs habitudes de consommation en 2022, en raison de l’inflation. Ces changements portent essentiellement sur la consommation d’énergie pour le logement et sur l’alimentation (réduction des quantités consommées, changement de gamme de produits, diversification des magasins fréquentés…), devant les déplacements et les vêtements. À noter : 4,1 milliards d’euros, soit une somme considérable, ont été versés aux salariés au second semestre 2022, dans le cadre de la prime de partage de la valeur, mesure de soutien au pouvoir d’achat.

L’impact sur les productions industrielles les plus énergivores

Face à l’augmentation des prix de l’énergie, les entreprises françaises interrogées par l’Insee dans le cadre de l’enquête de conjoncture, disent réagir surtout par une augmentation de leurs prix de vente, une adaptation de leurs méthodes de production, une compression de leurs marges et l’engagement d’investissements pour réduire leur facture. La hausse des prix de l’énergie a par ailleurs entraîné de fortes baisses de la production dans certaines branches industrielles, telles que la sidérurgie, la fabrication de papier et de carton et celle de produits chimiques de base, qui sont toutes des activités très énergivores.

Pas de récession dans les principales économies début 2023

La mise en perspective internationale fait apparaître que l’Europe est davantage exposée au choc énergétique que les États-Unis et que l’inflation sous-jacente (hors énergie et alimentation) reste élevée dans l’ensemble des économies occidentales. La croissance du PIB devrait se maintenir à des niveaux faibles les premiers et deuxièmes trimestres 2023 en France, en Allemagne, en Italie, en Espagne et aux États-Unis, (entre 0 et 0,4 %, par trimestre) ; seul le Royaume-Uni pourrait enregistrer une légère récession sur cette période (- 0,2%, par trimestre). Les prévisions de croissance du PIB pour la Chine s’établissent à +1% et +2% au premier et second trimestres.

Des prévisions entourées d’incertitudes

Parmi les incertitudes qui peuvent peser sur la croissance économique figurent les développements géopolitiques liés à la guerre en Ukraine, la stabilité du système financier après la faillite de la Silicon Valley Bank, les difficultés de Crédit Suisse et les politiques monétaires mises en œuvre par les banques centrales. En France, où le climat des affaires est bon, la croissance économique pourrait également être affectée par la contestation contre la réforme des retraites, selon la durée et l’étendue des grèves...