Emploi : plus d’un million de jeunes en apprentissage

Le maintien de l’aide unique à l’embauche pour les employeurs qui souhaitent recruter des jeunes en apprentissage devrait permettre à l’alternance de continuer sa courbe ascensionnelle, même si les chiffres se stabilisent. Les entreprises doivent se démarquer pour attirer ces profils de plus en plus recherchés.

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852 000 contrats d’apprentissage ont débuté en 2023 dans les secteurs privé et public. Le nombre de nouveaux contrats signés se stabilise, avec une hausse de seulement 2 % par rapport à 2022. Ces derniers chiffres, publiés par la Dares (ministère du Travail), faisaient également état de 1 020 000 contrats d’apprentissage en cours au 31 décembre 2023. A titre de comparaison, en 2018, année de la réforme Pénicaud, on en comptait 437 000. Aujourd’hui, ce sont six entreprises sur dix* qui ont déjà recruté en alternance. Et la tendance devrait se poursuivre en 2024, selon les premiers indicateurs.

Déperdition de candidats

Alors que la plateforme d’emploi Indeed enregistrait une hausse de 53% des annonces en alternance entre 2023 et 2022, 39% des entreprises déclarent que le manque de candidats dans leurs secteurs ou pour leurs métiers constitue le premier obstacle au recrutement en alternance. Dans le même temps, « Il n’y a pas 50% de candidats en plus, donc il y a des tensions extrêmes sur le sujet qui touche tous les secteurs d’activité, signalait Eric Gras, expert du marché du travail, chez Indeed France, lors du webinaire intitulé « Au cœur des recrutements en alternance », organisé par RH Matin. Si la difficulté était auparavant de trouver une entreprise, aujourd’hui ce sont les entreprises elles-mêmes et les centres de formation qui éprouvent des difficultés pour trouver des alternants ». Résultat, les entreprises doivent se démarquer pour attirer l’attention de ces profils de plus en plus recherchés. « Même avec une croissance faible, voire nulle, avec le vieillissement programmé de la population, il y a des gens qui partent qu’il va falloir remplacer. Etant donné qu’il n’y plus de candidats disponibles et que les tensions au niveau du recrutement vont s’intensifier, l’alternance est une des solutions indispensables », admet Eric Gras. Pour lui, l’alternance doit être vu comme un « levier stratégique », un moyen d’anticiper les besoins et d’intégrer des collaborateurs à la culture et au savoir-faire d’une entreprise. Au-delà d’être un « véritable sésame vers le monde professionnel » – la très grande majorité (92%) des entreprises propose des CDI à l’issue des alternances–, l’alternance répond donc à une vraie problématique. « C’est l’un des meilleurs moyens de combattre la pénurie de candidats et d’avoir des candidats motivés, formés, qualifiés et d’avoir un ROI important », signale-t-il.

Pour les jeunes, cela permet de faire naître des vocations et de se préparer au monde professionnel. Ainsi, 92% d’entre eux estiment que les formations en alternance leur permettent d’être mieux préparés à l’entrée dans le monde professionnel et 87% pensent qu’une formation en alternance représente « un plus » sur leur CV. Si historiquement l’alternance concernait essentiellement l’artisanat, elle s’est étendue à de nombreux autres secteurs tels que le commerce, la banque et la finance, l’alimentation, les services à la personne, l’informatique ou la grande distribution.

Campagne de recrutement dès le mois de mars

De la même manière qu’il faut soigner l’expérience candidat, il faut tout autant soigner l’expérience d’un alternant potentiel qui sera peut-être un futur collaborateur de l’entreprise. « Il faut accompagner les candidats dont c’est le plus souvent la première expérience dans la vie active », explique Noémie Boulard, Senior Strategic Client Manager chez Indeed France. Si 23% des alternants ont déclaré avoir envoyé une cinquantaine de CV, un quart signale, dans le même temps, ne pas avoir de retour de la part des entreprises et 44% recevoir moins d’une dizaine de retours.

Autre enjeu de taille pour réussir à recruter des alternants, rendre son offre visible dès que possible. « Les entreprises les plus performantes sur le sujet ont tendance à anticiper et à commencer leur campagne de recrutement dès début mars ». Même si, in fine, l’entreprise ne le recrutera qu’en septembre. « Vous pouvez signer un contrat d’apprentissage en mars pour une rentrée en septembre et verrouiller le candidat », prévient Nizarr Bourchada, directeur du pôle alternance du groupe IGS. Eric Gras observe que de plus en plus de formations sont accessibles tout au long de l’année, avec des « entrées décalées », et non plus seulement sur les seuls mois de septembre-octobre. « Pour certains métiers et pour certaines entreprises, cela leur permet de contourner une temporalité et une saisonnalité très forte. C’est maintenant tout de suite : les candidats commencent à analyser le marché et à regarder les offres, dès aujourd’hui », encourage Eric Gras. D’autant que le processus de recrutement et d’intégration prend beaucoup de temps pour un alternant, ajoute-t-il.

* Etude Indeed x Opinionway, Les jeunes, les entreprises et l’alternance, 2022

Charlotte DE SAINTIGNON


En chiffres

Le profil des apprentis pour les contrats débutés en 2023 dans le privé (97% des contrats signés)

Plus de la moitié (55 %) des contrats débutés l’an passé concernent des hommes ;

57 % des contrats sont signés par des apprentis ayant 20 ans ou plus ;

61 % des contrats s’inscrivent dans le cadre d’une formation de niveau bac+2 ou plus ;

33 % des contrats visent à préparer un titre professionnel (+1 point sur un an) ;

44 % des contrats sont signés dans des petites entreprises de moins de 10 salariés (contre 46 % en 2022) ;

53 % des contrats portent sur des durées de 18 mois ou plus (une part stable par rapport à 2022) ;

Quatre principaux secteurs d'activité ont recruté : le commerce et la réparation d'automobiles et de motocycles (23 % des contrats), le soutien aux entreprises (15 % ), l’industrie (14%) et la construction (11%).

Source : Système d'information sur l'apprentissage (SIA), Dares