Contrôle Urssaf, lutte contre la fraude sociale, paie : ce qui change pour les entreprises

La loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2023, publiée le 24 décembre 2022, comporte des mesures qui intéressent les entreprises. Revue de l’essentiel.

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Possibilité pour les Urssaf de corriger unilatéralement la DSN des employeurs

Depuis le 1er janvier 2017, la Déclaration sociale nominative (DSN) est le seul mode déclaratif pour transmettre les déclarations périodiques adressées par les employeurs aux organismes de protection sociale et signaler des événements (maladie, attestation employeur destinée à Pôle emploi...). Ces déclarations peuvent être vérifiées (CSS art. L 133-5-3).

La réforme prévoit qu’à compter du 1er janvier 2023, si le déclarant ne corrige pas sa DSN, la correction sera effectuée par les organismes de sécurité sociale auxquels la déclaration a été adressée. De même, il sera tenu compte des demandes de correction signalées par les autres organismes ou administrations destinataires des données. Un décret en Conseil d’État devra notamment déterminer les modalités d'organisation permettant la prise en compte des demandes de correction de l’ensemble des organismes et administrations concernés. Pratiquement, les organismes de recouvrement pourront rectifier d’office les DSN par la production d’une DSN dite de substitution (CSS art. L 133-5-3-1).

Durée des contrôles Urssaf dans les TPE

La LFSS limite la durée d’un contrôle Urssaf à trois mois ( comprise entre le début effectif du contrôle et la lettre d’observations) pour les entreprises de moins de 20 salariés, à compter du 1er janvier 2023 (CSS. art L 243-13).

Si le principe est clair, il est cependant balisé d’exceptions. Ainsi, une prorogation du délai de trois mois (une fois) est de droit, à la demande de l'employeur contrôlé ou de l'organisme de recouvrement.

De plus, la limitation de la durée des contrôles n’est, dans tous les cas, pas applicable :

- lorsque est détectée une situation de travail dissimulé ;

- dans les cas où l'entreprise ou le travailleur indépendant a fait obstacle au contrôle ;

- lorsque est identifiée une situation d'abus de droit ;

- lorsque les agents font le constat de comptabilité insuffisante ou de documentation soit inexploitable soit transmise (en cas, de contrôle sur pièces) ou remise (contrôle sur place) plus de 15 jours après réception de la demande de l’agent chargé du contrôle, ou en cas de report, à la demande de la personne contrôlée, d’une visite de l’agent ;

- enfin, cette durée limitée ne s'applique pas « lorsque la personne contrôlée appartient à un ensemble de personnes entre lesquelles il existe un lien de dépendance ou de contrôle» (par exemple : filiales d'un groupe employant un nombre supérieur de personnes ou société de travail temporaire qui ne compte que peu de salariés, mais gère le travail de plusieurs centaines de travailleurs intérimaires…)

Autant d’exceptions qui réduisent la portée du principe.

Contrôle dans le cadre d’un groupe de sociétés

Dans le cadre du contrôle d’une société appartenant à un groupe (entendu comme l’ensemble des personnes entre lesquelles existe un lien de détention ou de contrôle au sens des articles L. 233‑1 et L. 233‑3 du Code de commerce), l’agent de contrôle pourra, « afin de limiter les procédures redondantes » utiliser les documents et informations obtenus lors du contrôle d’une autre entité du même groupe. Toutefois, dans ce cas, il est prévu que l’agent chargé du contrôle sera tenu d’informer le cotisant de la teneur et de l’origine des documents ou informations obtenus, sur lesquels il se fonde. Sur sa demande et après que cette faculté lui aura été précisée, l’agent communiquera une copie des documents à la personne contrôlée (CSS art. L 243-7-4).

Lutte contre la fraude sociale

Les greffiers tribunaux de commerce sont autorisés à transmettre aux organismes sociaux des informations faisant présumer des fraudes, en matière de cotisations sociales (CSS art. L 114-16).

L’Urssaf pourra obtenir des informations bancaires, afin de recouvrer plus facilement les créances relatives à une infraction de travail dissimulé (CSS art. L 114-19).

Les agents de contrôle des organismes de protection sociale (Urssaf, caisses de MSA, Cnam, Cnaf, Cnav), de l’inspection du travail et de Pôle Emploi seront dotés de prérogatives de police judiciaire de cyberenquête, pour leur permettre de conduire des investigations sous pseudonyme sur Internet ou les réseaux sociaux, afin de rechercher et de constater des infractions d’escroquerie, de faux et d’usage de faux (CSS art. L. 114-22-3).

Réduction de la majoration de redressement, en cas de solidarité financière

Une majoration de 25 % (40 %, en cas de circonstances aggravantes) s’applique au montant du redressement des cotisations sociales, en cas de constat d’une infraction de travail dissimulée (CSS art. L. 243-7-7, I). Le taux de cette majoration (25 % ou 40 %) peut cependant être réduit de 10 points si le cotisant procède au règlement intégral des cotisations, pénalités et majorations de retard dans les 30 jours de leur notification ou si, dans le même délai, il a présenté un plan d’échelonnement du paiement au directeur de l’Urssaf et que ce dernier l’a accepté (CSS. art. L 243-7-7, II). La loi prévoit la possibilité d’appliquer ce même principe au donneur d’ordre (CSS art. L. 243- 7-7). Cette mesure est applicable depuis le 1 er janvier 2023.

De plus, la loi fait varier les sanctions encourues par le donneur d’ordre manquant à son obligation de vigilance, en fonction de la gravité des faits commis.

  • Paie

Ajustements pour la nouvelle déduction forfaitaire de cotisations patronales sur les heures supplémentaires. La loi (art. 22) apporte quelques modifications au dispositif de déduction forfaitaire de cotisations patronales sur les heures supplémentaires dans les entreprises de 20 à moins de 250 salariés.

Report du transfert du recouvrement des cotisations Agirc-Arrco aux Urssaf au 1er janvier 2024. Le recouvrement de la cotisation Apec et de celles des salariés expatriés sera également exercé à partir de cette date par les Urssaf.

François TAQUET, avocat,
spécialiste en droit du travail et protection sociale