Après les retraites, l’emploi des seniors

Favorables à la réforme des retraites, les syndicats patronaux souhaitent avant tout tourner la page de cet épisode marqué par un mouvement social dont le coût reste à évaluer. Mais le sujet de l’emploi des seniors est devant eux.

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« Que la page se tourne » : tel est le souhait exprimé par la CPME, Confédération des petites et moyennes entreprises, suite à la validation de la réforme des retraites par le Conseil constitutionnel, le 14 avril dernier. Cela fait quatre mois, en effet, que le pays est embourbé. Le 10 janvier, la première ministre, Élisabeth Borne, présente la réforme dont la mesure emblématique est le report de l’âge légal de départ à la retraite de 62 à 64 ans, à l’horizon 2030. Le texte promet aussi le relèvement de la pension minimum pour les carrières complètes à temps plein, à 85 % du Smic net. Le projet suscite une très forte mobilisation portée par un front syndical uni. Dès le 19 janvier, plus de deux millions de manifestants défilent, selon la CGT – 1,12 million de participants, d’après le ministère de l’Intérieur. Le 31 janvier et le 7 mars aussi, les mobilisations qui se succèdent sont massives.

Difficile d’évaluer le coût de ces mouvements sociaux où se conjuguent manifestations et grèves. Le journal Capital ( le 7 mars) a réalisé l’exercice, et cite Denis Ferrand, économiste, directeur général de Rexecode. Pour lui, les entreprises rompues au télétravail sont devenues plus résilientes face à ce type d’événement. Par ailleurs, les exemples de 1995 et 2019 montrent « qu’il n’y a pas eu de conséquences majeures sur le PIB, lors de ces grèves, pourtant massives et répétées », estime l’économiste. En 1995 et en 2019, les grèves contre la réforme des retraites, qui avaient lourdement touché les transports, avaient eu un impact trimestriel de -0,1 à -0,2 point sur la croissance. Reste qu’au niveau micro-économique, la situation peut se révéler très différente : pour les commerçants, la perte de chiffre d’affaires peut atteindre 20 % les jours de manifestation. Et tous les secteurs ne bénéficient pas de l’effet « rattrapage » des achats.

L’avenir de l’emploi des seniors et les 100 jours

S’il n’est pas certain que l’épisode de la réforme des retraites soit clos, il est en revanche sûr que celui de l’emploi des seniors commence à peine. En effet, le Conseil constitutionnel a censuré plusieurs dispositions de la réforme des retraites ayant trait à l’emploi des seniors. C’est le cas du « CDI seniors » qui devait soutenir l’embauche de chômeurs de longue durée ayant atteint ou dépassé le cap de la soixantaine et de l’index seniors, destiné à « objectiver la place » de cette catégorie d’âge dans les entreprises d’au moins 300 personnes.

Trois jours après l’annonce de la décision du Conseil constitutionnel, Emmanuel Macron, président de la République a annoncé, dans le cadre des « 100 jours », pour agir « au service de la France », un « pacte de la vie au travail », dont la construction devrait découler d’un dialogue entre les partenaires sociaux. Ces derniers ont été invités à l’Élysée, le 18 avril, mais seuls les syndicats patronaux ont répondu présent. A tous égards, le chantier s’annonce ardu. «Si ces discussions sont une façon pour le gouvernement de faire payer aux entreprises la facture du service après-vente de la réforme des retraites, ce serait un grave problème », estime Pierre Brajeux, candidat à la présidence du Medef, dans une interview au quotidien économique Les Échos. Sur BFMTV, Geoffroy Roux de Bézieux, l’actuel président du Medef, a déclaré : « Ce qu'il faut pas c'est qu'on soit dans une contrainte, ni de temps, les 100 jours je n'y crois pas, ni une contrainte qui nous dirait 'Il faut négocier sur ça et ça’». Il a appelé à un dialogue social préalable avec les syndicats de salariés. A date, ces derniers étaient mobilisés à faire du 1er mai une journée exceptionnelle de contestation de la réforme des retraites...